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Dossier ProjetsMener une correspondance de classes

Questions à Sabine Shölmerich et Gabi Puscau



Sabine Shölmerich et Gabi Puscau enseignent le français respectivement en Allemagne et en Roumanie. Leur point commun ? Elles ont participé l'an passé avec leurs élèves de sixième à un concours de correspondances de classes*, et l'ont remporté. L'idée de départ était de faire correspondre, par courrier postal ou par courriel, deux classes de français de deux pays différents. Bien plus qu’une simple compétition, il s'est agi en fait d'un véritable projet de classe comportant un triple intérêt : linguistique, culturel et pédagogique. Afin de rendre précisément compte de leur expérience, Sabine Schölmerich et Gabi Puscau ont accepté de répondre à nos questions.

Pourquoi avez-vous choisi de faire participer vos élèves à ce concours ?

S.S. : Mes élèves étaient dans leur première année d’apprentissage du français. J’avais le grand désir de leur montrer que le français est une langue vivante au sens propre du terme, j’ai donc cherché l’authenticité. C’est plutôt par hasard que je suis tombée sur la demande de M. Sadik (le professeur marocain). Il m’avait écrit qu’il s’occupait d’un projet sur le développement des zones rurales dans son pays et qu’il était professeur de français dans ce milieu-là. Je me suis dit que cela pouvait être intéressant d’échanger avec sa classe, et que dans un monde où les préjugés sur le monde arabe sont plus grands que les connaissances qu’on en a, on devait faciliter le contact des jeunes avec cette culture.

G.P. : J’ai souhaité réaliser ce projet pour mieux apprendre la langue française à mes élèves et par la même occasion, pour approfondir mes propres acquis. Nous avons aussi souhaité enrichir nos relations humaines avec des gens d’autres pays et ainsi prouver qu’on peut toujours considérer le français comme un "passe-partout" dans le monde entier.

Les élèves

Comment vos élèves ont-ils accueilli le projet ?

S.S. : Il y en a pas mal qui se sont mis à la recherche d’informations sur le Maroc et qui par conséquent ont commencé à voir au-delà de leur horizon quotidien et habituel. Les lettres échangées étaient d’un niveau assez rudimentaires donc on s’est beaucoup intéressés aux photos de la correspondance. La récompense possible du concours les a aussi beaucoup stimulés.

G.P. : Mes élèves étaient très contents et très intéressés.

Quels ont été les apports linguistiques, pédagogiques et culturels de cette expérience ?

S.S. : Les apports linguistiques ont été minimes même si tout ce qu’on fait pour identifier la langue enseignée dans un contexte réel apporte de la motivation pendant les heures de cours. Du point de vue pédagogique, les élèves ont pris conscience de l’utilité et de l’importance des contenus d’apprentissage en classe et se sont appliqués pour tenter de s’en servir.

G.P. : Au point de vue linguistique, les apports ont été nombreux : découverte de l’étymologie de certains mots migrateurs**, enrichissement et mise en pratique du vocabulaire, etc. Le mode de la correspondance nous a aussi permis de mieux apprendre la morphologie et la syntaxe de la langue française. Depuis cette expérience, le dictionnaire français roumain est devenu le "meilleur ami" de mes élèves ! Enfin, ce concours nous a donné la chance de lier une belle amitié entre ma classe et celle de Tunis. Les enfants ont parlé de leurs loisirs, de leurs cours... Ils se sont raconté les différentes traditions et légendes de leur pays.

Avez-vous rencontré des difficultés dans la mise en place du projet ?

S.S. : Comme toujours dans les établissements allemands, nous avons manqué de temps. Au début, le suivi du projet s’est fait pendant les heures de cours et ensuite je me suis sentie obligée de demander à des volontaires de rester pour rédiger après la classe. À cause de cette contrainte, seulement 12 élèves (sur 30) de ma classe ont vraiment pu participer.

G.P. : L’emploi du temps a été difficile à gérer surtout parce que nous étions également impliqués dans d’autres projets scolaires et extrascolaires.

En tant que classe lauréate, comment vos élèves et les autres enseignants de votre établissement ont-ils perçu votre initiative ?

S.S. : Les élèves ont été très fiers y compris ceux qui n’avaient pas participé dans la phase finale de la rédaction des lettres. Mon initiative a été bien perçue dans l’ensemble mais il y a toujours des collègues qui ne se sentent pas concernés par ce genre d’initiatives parce qu’ils n’ont pas l’envie, le temps ou la force de suivre cet exemple.

G.P. : Mes élèves ont été très enthousiastes et très curieux. Mes collègues enseignants ont perçu cette initiative soit avec admiration soit avec indifférence.

Les prix

Les efforts récompensés

Quels conseils donneriez-vous à un professeur qui souhaiterait participer à ce genre de concours ?

S.S. : Je recommande aux profs de se lancer pour acquérir des expériences au-delà du quotidien. Je conseille aux enseignants d’initier le projet et de rester accessible mais de donner aux élèves autant d’autonomie et de responsabilité que possible.

G.P. : Ayez confiance en vous et en vos élèves ! Mettez en discussion des sujets intéressants. Impliquez toute la classe dans ce concours ! Tenez compte des idées de vos élèves. Identifiez les lacunes des élèves. Écoutez avec attention la lecture des courriers échangés. N’oubliez pas d’être original et authentique à la fois. N’hésitez pas à exprimer votre identité. Lauréats ou non, il restera toujours de ce projet de belles relations d’amitié !

 

Notes

* Ce concours international est ouvert à tous les apprenants de français âgés de 10 à 18 ans. Il est organisé par la Fédération internationale des professeurs de français (FIPF) et a lieu chaque année. Les élèves allemands ont correspondu avec une classe marocaine et les élèves roumains avec une classe tunisienne. Ils ont eu à décrire ce qu'être jeune aujourd'hui dans leur pays signifiait.

** Les mots migrateurs dont il est question ici sont les 10 mots mis à l'honneur lors de la Semaine de la langue française en 2007. Le règlement du concours de correspondances de classes stipulait que les élèves devaient intégrer à leurs récits quelques-uns de ces mots.

Rédaction : Julie Letourneau - Première publication : 01/10/07 - Mise à jour : 01/10/07

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