actualités


Accueil > Entretiens

Prix RFI le monde en français

Entretien avec la lauréate

Quynh Huong Do enseigne au Vietnam dans les classes bilingues du lycée Chu Van An et au centre culturel français.

Pourquoi avoir choisi d’apprendre la langue française et d’être devenue professeur de français dans votre pays ?

Comme je le dis souvent, c’est le français qui m’a choisi et non l’inverse !

À l’entrée au lycée, j’ai pu passer un concours d’entrée réservé aux élèves doués en langues étrangères. Le test consistait, entre autres, à reconnaître les sons étrangers, à les répéter et à lire un texte sans accent. Suite à ce concours, j’ai été sélectionnée pour intégrer la classe de français. Par la suite, j’ai pu rentrer à l’université au département de français de l’école normale supérieure de langues étrangères sans passer le concours d’entrée qui est très difficile. J’ai donc choisi d’étudier la langue française à l’école normale supérieure de français.

J’ai reçu une bourse pour me spécialiser en interprète de conférence mais je menais en parallèle une formation pour devenir enseignante de français et j’ai donc décidé, faute de temps, d’abandonner la formation d’interprète. Je ne regrette pas ce choix ! Ce métier n’est pas du tout monotone, car il faut également innover pour trouver du plaisir à enseigner.

Vous avez participé au concours de RFI et vous avez choisi de travailler à partir d’un extrait traitant de l’actualité des femmes au Kenya. Pourquoi avoir participé à ce concours ? Aviez-vous déjà mené des activités avec la radio dans vos classes ?

Je souhaitais aborder ce thème qui m’intéressait particulièrement durant mes cours et c’est lors de ma deuxième séance de cours que l’idée de participer au concours m’est apparue.

J’avais déjà travaillé à partir d’extraits d’émissions radiophoniques de RFI ("Le journal en français facile", "Faits du jour"…) dans mes classes et j’avais déjà préparé beaucoup de matériel pédagogique (enregistrement d’extraits radiophoniques sur CD, accompagnés d’une fiche pédagogique) que je propose volontiers à mes collègues, puisque nous nous échangeons du matériel. Il est vrai que nous avons la contrainte de finir notre programme mais nous sommes plus libres vers la fin de l’année d’utiliser des documents authentiques dans nos classes.

En dehors de la salle de classe, je propose aux étudiants d’utiliser la radio en salle multimédia pour un apprentissage autonome guidé.

Dans mes classes spécialisées en communication, je constitue des dossiers sur des thèmes variés et je propose diverses ressources (par exemple, pour un dossier sur "le contrat nouvelle embauche", je propose un article de journal, un extrait radiophonique sur ce thème, un exercice de compréhension, un exposé par élève, etc.). J’aime varier et marier les supports et un extrait radiophonique peut parfois être l’élément déclencheur pour aborder un nouveau thème.

Avez-vous eu des retours de la part des élèves suite à l’utilisation en classe de ce support ?

Tout d’abord, je pense que ce support s’adresse essentiellement à des niveaux avancés, avec lesquels je travaille, car la compréhension d’un tel document peut s’avérer très difficile. J’aimerais, dans l’avenir, l’introduire dès le niveau débutant mais cela demandera un travail préalable de didactisation différent.

En général, la première impression des élèves écoutant un document radiophonique est souvent négative car ils trouvent que le débit est trop rapide et les accents différents peuvent compliquer l’écoute. Par la suite, les exercices de compréhension et d’expression facilitent l’accès à ce type de document.

On peut ensuite proposer des activités moins guidées. En effet, après l’écoute de plusieurs extraits différents en classe, les élèves ont de moins en moins besoin de soutien et de guide pour la compréhension et ils se sentent plus à l’aise et plus en confiance avec ce type de support.

Quelles techniques et activités motivantes proposez-vous à vos élèves ?

Je propose à mes élèves, notamment en classes spécialisées en communication et dans mes cours de français pratique, des techniques propres à l’exposé oral, à savoir : comment construire un plan (la recherche d’idées), comment poser des questions, comment rechercher des idées et les associer, comment faire des transitions…

Pour motiver mes élèves, je propose des débats sur un thème donné issu de l’actualité. Nous faisons également des simulations, des jeux de rôles, des exposés oraux…

J’aborde, dans certaines classes, le français professionnel et je forme donc mes étudiants aux techniques orales particulières du FOS (se présenter en public, participer à un entretien professionnel, etc.).

Il faut noter que l’expression orale n’est pas abordée dans notre système éducatif vietnamien et que les techniques sont normalement réservées aux journalistes. Cela est donc une nouveauté pour beaucoup quand ils commencent le français (cela l’est moins pour les élèves en classes bilingues qui commencent le français très jeunes, à 6 ans).

L’Ambassade de France, en collaboration avec le ministère de l’Éducation et de la Formation, propose des concours d’éloquence qui encouragent les élèves à prendre la parole. Cette année deux lauréats sur les trois premiers étaient issus des classes bilingues des lycées d’Hanoï-Amsterdam et de Chu Van A et ont abordé des thèmes novateurs comme "le concubinage au Vietnam", "Éducation à la sexualité" ou "Vers une nouvelle éducation des enfants".

Vos élèves parlent-ils français en dehors de l’établissement ?

Malheureusement beaucoup ne parlent pas français en dehors de la salle de classe ! Mais certains ont des correspondants français et nous recevons assez régulièrement des étudiants français durant l’été dans notre ville et les étudiants sont ravis de pouvoir échanger et pratiquer la langue française.

Quelles raisons poussent vos élèves à apprendre le français ? Quel est, d’après vous, l’avenir du français au Vietnam ?

Beaucoup envisagent de faire des études en France ou de travailler dans des entreprises françaises au Vietnam ou ils devront parler et travailler en français.

Je garde l’espoir que le français reste une langue étudiée dans mon pays. Les classes bilingues fonctionnent bien même si l’on constate une pénurie de professeurs compétents en sciences.

La seule ombre au tableau : la suppression de certains cours au Centre culturel français et donc le licenciement d’enseignants qui auront du mal à trouver d’autres heures de cours de français.

Lien :

Lire la fiche pédagogique

Première publication : 18/12/06 - Mise à jour : 18/12/06

© Franc-parler.org : un site de
l'Organisation internationale de la Francophonie