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Ubu, une nouvelle maison d'édition

Entretien avec Pierre Bisiou

Pierre Bisiou a cofondé la maison d'édition française Le Serpent à plumes en 1992. Depuis janvier 2006, il dirige une toute nouvelle structure Ubu éditions, qui a déjà publié cinq auteurs dont Ken Bugul du Sénégal et Florent Couao-Zotti du Bénin.

Pourquoi avoir créé Ubu éditions et quels sont vos objectifs ?

La vente du Serpent à Plumes aux éditions du Rocher, en 2002, a brutalement mis à fin à une aventure éditoriale passionnante que nous partagions depuis 1988, avec la création de la revue éponyme. Au-delà des stratégies commerciales ou financières des uns ou des autres, nous étions quelques-uns à ne pas souhaiter abandonner ce métier de l’édition en dépit des obstacles. De rencontres en discussions, nous nous sommes finalement retrouver à quatre, Delphine Bourgoin (25 ans), Dorothée Bruchet (26 ans), Anne-Cécile Herry (24 ans) et moi-même pour créer cette nouvelle maison.

Notre ambition est de publier peu de textes pour mieux les accompagner, auprès des libraires, des bibliothécaires et des lecteurs. Soit une douzaine de titres par an. Nous publierons essentiellement de la littérature contemporaine, française et étrangère.

Deux de vos auteurs seront présents au prochain salon du livre de Paris qui accueille cette année le festival francophone en France Francofffonies ! Pensez-vous que cette littérature dite "francophone" occupe une place suffisamment importante dans les programmes scolaires, ou auprès du grand public par exemple ?

Je crois qu’il y a une sorte d’incompréhension au sujet de la "littérature francophone". Que signifie ce mot "francophone" ? Césaire est francophone, Beckett est francophone, Sollers est francophone, Kundera est francophone ! Or la vision donnée actuellement à la francophonie est celle d’une communauté de non-français issus des anciennes colonies et parlant français. C’est absurde. Il y a là une confusion malsaine dont il faut se débarrasser.

En revanche, il est évident que les programmes scolaires méconnaissent largement – comme à vrai dire tout le petit monde littéraire français – les auteurs "post-coloniaux". L’Angleterre a su depuis longtemps accueillir au sein de sa littérature et à rang égal les Coetzee, Ishiguro, Achebe, Rushdie et autres, sans se soucier de leur pays de naissance. C’est la voie qu’il faut suivre. Ouvrons notre curiosité et notre langue à toutes les influences, nous ne nous enrichirons que plus de ces apports !

Quels sont vos projets à court et moyen termes ?

Notre première ambition est de parvenir à offrir, via Ubu, une ligne éditoriale ouverte, proposant des textes de qualité. En tant qu’éditeur, notre rôle est double : quand nous faisons le choix de publier un livre, c’est à la fois pour rendre hommage à son auteur, parce que nous croyons en lui, en son œuvre, et pour donner du plaisir à ses lecteurs. Nous nous devons donc d’assurer la plus grande diffusion possible aux textes que nous choisissons de publier, tout en publiant un nombre restreint de textes pour les travailler au mieux.

Notre projet est de faire vivre une maison de littérature exigeante. C’est en soi un défi non négligeable pour une maison indépendante tout juste née en 2006 ; c’est donc, ne le cachons pas, à la fois une aventure éditoriale et un plaisir immense.


Couverture

Florent Couao-Zotti, Les Fantômes du Brésil

Rédaction : Emeline Giguet-Legdhen - Première publication : 13/03/06 - Mise à jour : 13/03/06

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